21 septembre 2013
Le 21 septembre 2013, en l’abbatiale de Floreffe, Mgr Rémi Vancottem a conféré la bénédiction abbatiale au Révérendissime Père Benoît Carniaux, 59e abbé de Leffe.
Avant même de fonder Prémontré, le 27 novembre 1121, saint Norbert reçut de la comtesse de Namur, Ermesinde, une fondation richement dotée d’une église avec sa dîme, ses bois, ses vignobles et ses chapelles attenantes : Floreffe, sur la Sambre. Ermesinde et son époux désiraient une "nouvelle" communauté acquise à la réforme grégorienne pour desservir ce lieu. Quelque trente ans plus tard, en 1152, Gerland, abbé de Floreffe, envoya à Leffe, faubourg de Dinant, une petite communauté de religieux. Celle-ci fut favorisée par le comte de Namur, Henri l’Aveugle, et dès 1200, elle passa du statut de prieuré à celui d’abbaye indépendante. Floreffe est donc la "mère", la communauté fondatrice de l’abbaye de Leffe.
Chers amis, Frères et Sœurs, que dire à ce moment sinon merci ? Merci à Dieu, qui au moment de mon baptême, par la voix de mes parents, m’a donné le nom de « béni » et vient de renouveler ce don d’une manière vraiment très particulière. Merci à vous, chère Maman, cher Papa, qui êtes venus aujourd’hui malgré l’épreuve du grand âge. Merci à mon frère Jean-Claude, qui sans aucun doute se réjouit dans le ciel avec tous ceux que, chacune, chacun, nous avons perdus trop tôt mais qui nous restent pourtant si proches. Avec tous ceux aussi qui ont prié et chanté dans cette église depuis qu’il y a 892 ans, saint Norbert a célébré la messe sur une pierre qui se trouve dans l’ancien autel. Merci à ma famille pour son soutien vraiment très amical. Merci à vous qui représentez la société civile en vos titres et qualités. Merci à vous tous qui êtes venus par amitié. Nous pouvons dire que nous aimons quelqu’un lorsque cette personne en vient à faire irrémédiablement partie de nous et de notre vie. Lorsque ce qui lui arrive, nous le vivons nous aussi dans notre chair. Alors, si nous aimons vraiment cette personne, nous prenons plus de soin d’elle que de nous-même. Voilà une belle vocation pour un abbé, comme pour tout pasteur ! C’est ce que j’espère réaliser à votre égard, si vous m’y autorisez. Beaucoup m’ont dit qu’ils étaient très honorés de participer à cette célébration j’en suis totalement abasourdi car je reste persuadé que c’est la communauté de Leffe et moi-même qui sommes honorés de votre présence et non l’inverse. Merci donc à vous tous d’être là et d’être vous.
Je voudrais adresser des remerciements particuliers à tous ceux qui ont pu rendre cette célébration possible. A vous bien sûr Monseigneur Vancottem, pour votre gentillesse, votre accueil toujours attentionné et votre bienveillance. A vous également Monseigneur Warin, qui présidez le Bureau Administratif du Séminaire, propriétaire de ces lieux et nous avez cordialement autorisés à l’envahir. Un salut tout spécial aux abbesses et prieures présentes aujourd’hui. Avec les premières, je partage maintenant le port du bâton pastoral. Cela me réjouit profondément que la bénédiction abbatiale soit un sacramental indistinctement donné à des personnes des deux sexes. Avec le cardinal Marx de Munich, un des huit conseillers du Pape François, et quelques autres évêques allemands j’espère qu’à l’avenir, ce qui peut paraître pour l’instant à l’échelle de toute l’Église n’être qu’une curiosité anecdotique, la bénédiction des abbesses, pourra aider qui de droit à réfléchir intelligemment à tout ce que les femmes peuvent apporter à la catholicité.
Monsieur l’abbé Massard nous a réservé un accueil royal, oserais-je même dire « papal » ? Monsieur Alexandre et son équipe du Moulin Brasserie ont été d’une efficacité et d’une disponibilité exemplaires. Qu’ils en soient très vivement applaudis.
Le père Bruno, à qui je succède, me laisse un très bel héritage. J’espère le faire fructifier, non auprès de la banque du Vatican dont on parle tellement ces jours-ci, mais auprès du cœur de Dieu qui est surabondance de grâce pour nous tous. Père Bruno, vous avez exercé votre charge abbatiale tout en cultivant les roses. Moi, ce sera sans doute plutôt en cultivant les pensées. Bon. Qu’importe le style, du moment que la charité est au centre. J’espère être aussi fidèle à ma devise que vous l’avez été à la vôtre : « Ama ». Aime.
Dear Abbots and Confreres of the Norbertine order, thank you for your presence ! This reflects the communion that binds our monasteries to each other. Not only a communion of law, but a communion of love which translates into concrete actions and genuine mutual assistance. Be sure of the availability of our canonry to build and strengthen this growing Vinculum Caritatis. Thank you, Abbot Thomas, for your kind words and your encouragements. Since you preside over the communion of all our monasteries, I welcome your words as those of the entire Order.
Cette célébration et ce qui va suivre a été une préparation de longue haleine, portée d’une façon ou de l’autre par tous les frères de la communauté. Mais certains, de par leur fonction, y ont perdu plus de cheveux que d’autres et ils n’auront ni mitre ni calotte pour le cacher ! Grâce leur soit rendue au centuple de leur générosité et de leur souplesse.
Le personnel de notre abbaye a été d’un soutien sans faille et je voudrais spécialement remercier les personnes qui, parfois jusqu’à l’épuisement, ont travaillé de près à cette célébration : merci pour leur souci intelligent et énergique du « toujours mieux ». Beaucoup les reconnaîtront sans que j’aie à citer leur nom.
Merci à Guillaume Houque et aux étudiants de l’Institut de Musique Et de Pédagogie de Namur, l’IMEP, qui sont venu nous aider si merveilleusement à prier deux fois, comme dit saint Augustin. Merci également au chœur grégorien de Malonne de nous avoir partagé ses talents. Enfin, merci aux amis qui ont rejoint cette chorale de circonstance : certains d’entre eux m’ont dit leur crainte de chanter à côté de professionnels. Pourtant dans « amateur », il y a le mot aimer, dès lors que toute crainte soit réduite à néant. Merci aux techniciens qui ont pu, par l’image et le son, nous rapprocher au-delà des contraintes de l’espace. Merci à tous les artisans qui ont contribué à la beauté de cette célébration par la décoration florale et les objets liturgiques. La liturgie est apocalyptique, elle doit nous faire goûter le ciel présent sur la terre et la terre qui s’épanouit dans le ciel. Nous avons, grâce à Dieu, vécu un peu cela aujourd’hui.
Le prêtre, a fortiori l’abbé et l’évêque représentent ceux qu’ils servent. Le bâton pastoral qui m’a été remis rappelle un peu le sceptre des Pharaons. Il est le signe de cette autorité que dans l’Exode, Moïse, au nom de Dieu, a ravie au pouvoir du mal afin de faire le bien. Il y a quinze jours, le Père abbé de Maredsous rappelait à certains d’entre nous que, d’après le récit de l’Exode, son bâton fut utile à Moïse pour trois choses : écarter la mer rouge, faire jaillir l’eau dans le désert et s’appuyer dessus. Autrement dit et transposé dans la vie spirituelle : éloigner la peur pour libérer, abreuver à partir de l’unique source de la Parole de Dieu et des sacrements, rassurer en procurant un appui. Rien de magique là-dedans. Pour que ce bâton fonctionne bien, comme dit le Siracide, il faut aussi être couronné de crainte par la sagesse, cette crainte de Dieu qui n’est autre que de l’amour attentif et prévenant envers lui. Cela ne fait que quelques instants que je la porte, mais je crois que cette mitre aidera bien le Seigneur à se rappeler à mon bon souvenir ! Enfin cette alliance que je porte au doigt désormais est là pour signifier non seulement mon alliance avec ceux que Dieu me confie, mais également pour me rappeler que c’est par ma fidélité à Dieu que je puis être garant de la leur. Prophète comme Moïse, sage comme un roi et édificateur de liens de charité, « Pontife », faiseur de pont comme un prêtre, l’abbé ne reçoit rien de plus que ce qu’il a déjà reçu au baptême, comme vous. C’est là un peu ce qui sous-tend ma devise dont vous pourrez lire l’explication dans le carnet de célébration : pour vous je veux rester un frère, afin d’être compté avec vous au nombre des filles et des fils de Dieu.